« Je n’ai pas de problème avec les musulmans mais avec l’islam » Interview pour Le Point

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Découvrez mon interview parue le 23 septembre sur le site du Point.

Vous êtes candidat à la primaire. De quel candidat êtes-vous le plus proche et le plus éloigné ?

Jean-Frédéric Poisson : Je me sens le plus éloigné de Nathalie Kosciuscko-Morizet sur les questions de société et d’Alain Juppé sur les questions d’identité. On peut considérer que sur un plan régalien, je suis plus proche de Nicolas Sarkozy. Mais en vérité, sur les questions économiques, je me tiens à équidistance de tous car je suis le seul candidat non libéral et souverainiste de cette primaire ! Un souverainiste qui croit en l’Europe des Nations. Je ne partage pas la confiance de mes adversaires de la primaire en cette Europe de Bruxelles. Je n’ai d’ailleurs pas voté en faveur du Traité de Maastricht ni ratifié le traité de Lisbonne ou le traité dit Merkozy. Eux l’ont fait !

Quant au libéralisme, il ne permet pas toujours une répartition juste des richesses. Je suis pour ma part partisan d’un partage des richesses.

Vous partagez avec Sarkozy l’idée qu’il faut « libérer la France de Mai 68 ». C’est votre expression. Qu’entendez-vous par là ?

Avec Nicolas Sarkozy, nous sommes d’accord mais pas tout à fait pour les mêmes raisons. Mai 68 a été le point de départ du refus de principe de toute autorité. Nous en payons aujourd’hui les conséquences, ne serait-ce qu’à l’école où l’élève se croit le patron de la classe. Cette déliquescence de l’autorité s’est ressenti dans toutes les institutions de l’Etat.

Le deuxième slogan de Mai 68 était « jouir sans entrave ». Cette idée est à l’origine du fait que notre société n’a cessé d’accorder toujours plus de droits aux individus au détriment du collectif. La gauche a promu cet individualisme au point de perdre le sens de la protection du collectif qui était son credo. Emmanuel Macron en est le plus parfait exemple. La primauté des droits individuels est un facteur de déstabilisation sociale majeur. Je ne suis pas sûr que Sarkozy me rejoigne sur ce second point…

Il y avait un slogan de « Mai 68 » avec lequel je pourrais être d’accord, c’est « Soyez réaliste, demandez l’impossible ! » (rires)

Et vous vous l’appliquerez pour cette primaire ! 

Exactement ! (sourire)

Si vous êtes éliminé, soutiendrez-vous Nicolas Sarkozy au second tour de la primaire ? Certains prétendent que vous avez un « deal » avec lui…

Vous avez lu ça dans Spirou ? (sourire). J’ai la réputation d’être un homme libre, pas vraiment malléable. Je n’ai pris que deux engagements en participant à cette primaire : ne pas me présenter au 1er tour de la présidentielle si je suis battu et soutenir le candidat vainqueur de la primaire. Pour l’entre-deux tour, je n’ai pris aucun engagement, avec personne. Je discuterai avec chacun des finalistes dont il est impossible, à ce stade, de savoir qui ils seront.

Ce que je sais, c’est qu’Alain Juppé, s’il veut gagner la présidentielle, devra bouger sur son programme. Car pour l’heure, de ce que j’entends, il ne réformera pas la France.

Justement, Alain Juppé défend l’idée que la France peut s’apaiser et retrouver une « identité heureuse ». Ce n’est pas un bon objectif ?

Je ne sais pas ce qu’il veut dire car je ne connais pas d’identité heureuse. Chacun vit très bien avec une part de soi et très mal avec une autre part de soi.

C’est une position philosophique mais que voulez-vous dire en terme politique ?

La France possède une identité chrétienne, judéo-chrétienne, greco-romaine… Elle n’est pas multiculturelle comme les sociétés anglo-saxonnes. Elle est latine et vit dans ce référent culturel qui régit les grands fondamentaux de sa société : sa relation au monde, au travail, au mariage,… Si nous nions cette identité, et c’est ce que nous faisons bien trop aujourd’hui, nous affaiblissons le corps social. François Hollande a tenté au cours de ce quinquennat de refondre la France dans le modèle social-démocrate suédois. Merci mais ça ne marche pas ! Si la France est judéo-chrétienne, elle n’en est pas moins ouverte au monde et conserve toute sa capacité d’accueil.

Mais alors comment mixer cette culture judéo-chrétienne avec les 4 millions de musulmans présents sur notre sol ?

Il faut dire plusieurs choses aux musulmans. La première est qu’ils sont les bienvenus car la France offre un cadre qui permet aux musulmans de pratiquer leur foi librement. Moi, je n’ai pas de problème avec les musulmans mais j’ai un problème avec l’Islam qui développe des références culturelles incompatibles avec les nôtres.

A quoi pensez-vous ?

Par exemple, sur la liberté. L’Islam ne tolère pas la conversion au christianisme ni le mariage avec quelqu’un de foi chrétienne.

Idem sur l’égalité et en particulier sur l’égalité entrs les hommes et les femmes. Récemment encore, l’Iran a interdit aux femmes de faire du vélo.

Enfin sur la fraternité. Dans l’Islam, cette fraternité est réservée à l’oumma, à savoir la communauté des croyants. Chez nous, la fraternité est universelle.

Idem sur la dignité de l’homme. Dans l’Islam, un voleur se fait couper la main. Je ne crois pas qu’un député français proposera un tel amendement au code pénal.

Ceci dit, je ne dis pas que les musulmans sont d’accord avec cette conception islamique. Car beaucoup ont adopté notre référent culturel, qu’ils vivent en France ou dans les pays qui furent nos colonies. Ils se sont adaptés car le référent culturel judéo-chrétien était clair. Pendant longtemps, cela ne posait aucun problème et jamais ils n’auraient voulu se baigner en burkini, exiger des menus halal ou créer des écoles coraniques.

Je n’ai rien, par exemple, contre les abattages rituels à condition que les musulmans s’organisent pour qu’il évolue et respecte les normes françaises.

Vous avez déclaré que vous vous sentiez proche de Marion Maréchal-Le Pen et que vous espériez la réconciliation des droites. Vous imaginez une alliance entre Les Républicains et le Fn après 2017 ?

Non, je n’ai jamais parlé d’alliances partisanes. Je souhaite en revanche le rassemblement des personnes qui sont d’accord sur cette approche culturelle et qui aujourd’hui sont chez Les Républicains ou militent au FN sans une once de racisme ou de xénophobie.

En quoi êtes-vous proche de Marion Maréchal Le Pen ?

Nous nous rejoignons sur la dignité des personnes mais je sais aussi pourquoi, en l’état, je ne serai jamais adhérent du Front national.

Pourquoi ?

D’abord, je ne serai jamais favorable à la peine de mort sans exception. Je ne serai également jamais d’accord avec la préférence nationale. Pour ma part, une personne étrangère qui démontre ses mérites, sa valeur ne peut pas être moins bien traitée qu’un Français qui n’aurait aucun mérite.

Je ne partage pas non plus la vision européenne du Front national ni ses conceptions économiques – en considérant qu’elles sont cohérentes, ce qui reste à démontrer.

Dans votre programme, vous annoncez son abrogation et notamment le verrouillage des questions de filiation. Est-ce à dire que, selon vous, les parents homosexuels ne sont pas de bons parents ?

Ah non ! Je ne remets pas du tout en cause l’affection que les parents homosexuels pour leurs enfants. Je ne suis pas un moralisateur, ni un juge ou un conseiller conjugal. Je suis un législateur. Et à ce titre, pour des raisons anthropologiques et philosophiques, je considère que la loi n’a pas le droit de priver un enfant de l’accès à ses deux parents de sexe différent. Or, c’est ce que fait la loi Taubira. On ne coupe pas un enfant de ses racines. Nous sommes tous des êtres incomplets. Cette incomplétude est notre humanité. C’est pour cette raison que nous recherchons l’altérité.Un sondage récent montre que 63 % des sondés ne souhaitent pas remettre en cause la loi Taubira. N’est-ce pas dissuasif ? Faut-il réellement rouvrir ce débat ?
Il est vrai qu’aujourd’hui les Français ont bien d’autres soucis. Et beaucoup d’entre eux sont légitimistes : puisque la loi est votée, inutile de revenir en arrière. Mais tout dépend de la manière dont la question est posée. Si vous demandez aux Français, faut-il empêcher les homosexuels de se marier, ils répondent non. Mais si vous leur demander, « peut-on priver un enfant d’un père et d’une mère ? », ils répondront massivement non. C’est pourtant ce que fait la loi Taubira. Il faut aussi empêcher la conséquence mécanique de la loi Taubira qui aboutira, à terme, à légaliser les mères porteuses.

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